Alliant performance et robustesse, les servomoteurs Dynamixel de ROBOTIS sont utilisés pour du prototypage dans le domaine de la robotique spatiale, notamment par le CNES (Centre national d’études spatiales).
Le CNES les utilise entre autres dans la conception du prototype terrien d’un robot d’exploration qui sera envoyé sur Phobos, l’une des deux lunes de la planète Mars.
L’objectif de ce petit robot : étudier les propriétés physiques et la composition du régolithe couvrant la surface de Phobos.
Pourquoi aller sur Phobos ?
Ce projet de rover, fruit d’une coopération entre la France et l’Allemagne, fait partie de la mission MMX (Martian Moons Exploration), de l’agence spatiale Japonaise, la JAXA.
La mission MMX a pour but de mieux comprendre l’histoire de la formation des deux lunes de Mars. L’étude des satellites de Mars doit permettre d’affiner le scénario de formation des planètes du système solaire, notamment d’en savoir plus sur la provenance de l’eau sur Terre. Pour cela, la sonde japonaise embarque une multitude d’instruments scientifiques. Elle-même va se poser successivement sur les deux lunes afin de collecter quelques grammes de régolithe qui seront, via une capsule de retour, ramenés sur Terre pour y être étudiés.
Le petit rover sera largué à la surface de Phobos par la sonde MMX lors d’un survol à très basse altitude. Sa mission devrait alors durer une centaine de jours.
A noter que dans la conquête de Mars par l’Homme, les deux petites lunes pourraient jouer un grand rôle. En effet, elles sont vues comme des stations relais entre le voyage interplanétaire et l’atterrissage en lui-même. Tout comme le module Apollo, en orbite Lunaire, a servi de relais à l’atterrisseur Eagle en 1969. La mission MMX doit être lancée en 2024 depuis la base de Tenegashima, avec un retour de l’échantillon sur Terre vers 2029.
La mission du binôme franco-allemand : concevoir un astromobile autonome de seulement 25kg
La mission allemande
Le DLR, l’agence spatiale allemande est en charge la structure externe de l’astromobile, les composants assurant sa mobilité (jambe, roue) et le mécanisme de séparation d’avec la sonde. Ils vont également fournir deux instruments scientifiques : un radiomètre et un spectromètre Raman.
La mission française
Le CNES, l’agence spatiale française travaille sur l’ordinateur de bord et son logiciel de vol, la chaîne d’alimentation électrique (panneau solaire, batterie, convertisseurs), et le lien de télécommunication radio entre le rover et la sonde. Les instruments français sont constitués de 4 caméras haute résolution.
Architecture mécanique : zoom sur la fonction uprighting
Nous avons discuté de cette mission avec Jean Bertrand, ingénieur au CNES et responsable des aspects mécatroniques au sein du service de robotique d’Exploration planétaire au Centre Spatial de Toulouse.
Pour la mission MMX, Jean Bertrand à notamment en charge la fabrication de la maquette terrestre du rover. Pour motoriser celle-ci, il a choisi de se fournir chez Génération Robots, qui est le distributeur exclusif de servomoteurs Dynamixel en France.
La raison d’être de la maquette fonctionnelle du rover et de tester la fonction d’auto-redressement (dite « uprighting ») du rover MMX.
A quoi sert la fonction up-righting ?
Lorsque la sonde spatiale MMX survolera Phobos à très basse altitude (environ 40m), elle larguera le rover tel-quel, sans aucun système de protection ou de freinage. La gravité étant extrêmement faible sur Phobos, une chute libre de 40m y équivaut à une chute de seulement 6cm sur Terre.
Le petit rover rebondira alors sur la surface, jusqu’à se stabiliser dans une position aléatoire. Une fois le robot stabilisé, la fonction uprighting se lancera.
Le robot effectuera cette opération critique en autonomie, la télé-opération depuis la Terre étant strictement impossible pendant toute la phase d’atterrissage. Autre contrainte : l’opération ne devra s’effectuer qu’avec une seule charge de batterie car, bien entendu, les panneaux solaires sont repliés sur le dos du rover à ce stade.
Des moteurs déploieront les longues jambes du robot (équipées de roues aux extrémités), qui seront alors utilisées comme leviers pour lui faire faire une roulade au sol afin qu’il se trouve finalement dans sa position de fonctionnement, debout sur ses quatre roues.
La séquence uprighting a été prévue pour fonctionner quelque soit la position dans laquelle le robot se stabilise sur le sol de Phobos. Si jamais il se trouve sur le flanc, les jambes n’ont pas d’effet de levier. La séquence inclut donc une position dite « parachutiste » où le rover a les quatre jambes orientées vers le haut. Cette position lui permet de basculer, au moins partiellement, sur le ventre. Plusieurs mouvements successifs des quatre jambes lui permettent ensuite de se mettre debout.
Une fois à l’endroit, les panneaux solaires, qui alimenteront le robot pendant toute sa mission, pourront alors se déployer en toute sécurité.
Un prototype terrien pour tester et valider la fonction up-righting
Le prototype qui sert à effectuer les tests et valider la fonction uprighting est forcément différent du robot qui sera envoyé sur Phobos.
En effet, la gravité de Phobos est 2000 fois plus faible que la gravité terrestre. Le vrai rover, conçu pour Phobos, risquerait d’être rapidement détruit s’il faisait des roulades sous gravité terrestre. Son châssis en Nida carbone et ses fines jambes (même faites en titane) ne supporteraient pas les chocs très longtemps !
La maquette terrestre est robuste et peu coûteuse comparée au vrai Rover. Son châssis, pratiquement incassable, est fabriqué en polycarbonate. Ses actionneurs sont des servomoteurs Dynamixel à la foi robustes et très précis.
Les points forts des servomoteurs Dynamixel pour le CNES
Ce projet nécessite des moteurs ayant différents types d’asservissement (en position ou en vitesse). Ce que proposent nativement les servomoteurs Dynamixel, qui intègrent des asservissements PID précis et stables.
Ils offrent également de nombreux paramètres de configuration. Il est par exemple possible de limiter facilement le couple, ce qui est important pour assurer la sécurité des différents opérateurs lorsqu’on est sur des servomoteurs puissants comme les Dynamixel-P. Pour le déploiement des jambes, le couple des servos a été bridé à une puissance de 30% au-delà du couple nécessaire au redressement du robot.
Autre gros avantage des servomoteurs Dynamixel pour cette mission : ils peuvent être pilotés via une liaison série UART. Ce sera également le cas du robot envoyé sur Phobos, qui utilise SpaceWire, un bus informatique basé historiquement sur le standard IEEE 1355 et utilisé aujourd’hui dans de très nombreuse missions spatiales de la NASA, de l’ESA ou de la JAXA (l’agence spatiale japonaise).
Cela permet de développer des codes informatiques assez similaires pour piloter les moteurs de la maquette et du vrai rover. Par exemple, comme le système de locomotion du DLR, les Dynamixel permettent de récupérer la vitesse instantanée et le couple instantané à une fréquence de 10 Hz. C’est très important car la supervision continue de l’état des actionneurs est une fonction capitale de l’algorithme d’uprighting.
Un autre atout est que tous les servomoteurs de la gamme se pilotent de la même manière, ce qui permet de tester facilement plusieurs modèles de servomoteurs avec le même code informatique, et ainsi de déterminer rapidement quel est le servomoteur optimal pour une application spécifique.
Durant les phases de ce projet, l’équipe du CNES a ainsi pu passer facilement des servomoteurs MX-64 sur le premier prototype, à la gamme pro Dynamixel-P (modèle PH54-100-S500-R) pour la maquette définitive.
Version du prototype avec les servos MX64-AR
Version du prototype avec les PH54-100-S500-R
La seule contrainte a été d’implanter une table d’adressage indexée dans les servos Dynamixel-P pour pouvoir les piloter avec exactement le même code informatique que les Dynamixel MX ou XM.
Dans la version finale de la maquette, cette table de correspondance permet d’avoir des chaînes mixtes entre les servomoteurs Dynamixel des roues (série XM) et servomoteurs Dynamixel-P (anciennement Dynamixel Pro), utilisés pour le déploiement des jambes.
Pour le logiciel embarqué dans la maquette, le CNES a choisi le langage C, toujours pour rester le plus proche possible du logiciel du vrai rover. Le C n’est pas forcément la manière la plus simple de piloter les servomoteurs Dynamixel. Mais, grâce au kit de développement logiciel (SDK) et à la documentation fournie par le constructeur ROBOTIS cela reste à la portée d’un développeur C avec quelques années d’expérience.
Sélection des servomoteurs Dynamixel pour le prototype du rover MMX
Motorisation des roues : servomoteurs XM430-W210-R
=> Raison du choix : ici la dimension a son importance, il n’y a pas besoin d’avoir un fort couple ou beaucoup de vitesse, mais d’avoir des servos compacts qui puissent prendre place à l’intérieur des roues.
Déploiement des jambes : servomoteurs MX-64AR, puis PH54-100-S500-R
=> Raison du choix : des premiers tests ont été faits avec les MX-64AR. Mais comme dans certaines situations un seul servo doit supporter tout le poids de la maquette, ils manquaient de couple. Les servomoteurs de la gamme Dynamixel-P permettent d’avoir une puissance largement suffisante dans tous les cas.